À la UNE

Concours de scénario

En partenariat avec CORSESCA Productions, l'association organise, dans le cadre du Festival du film de Lama, le premier concours de scénario.

Il s'agit d'écrire un court métrage, dont l'action se déroule principalement en milieu rural.

Le scénario primé sera produit par CORSESCA entièrement à ses frais et projeté, un an après la proclamation des résultats, en avant-première, au Festival du Film de Lama.

Date limite de dépôt des manuscrits : 30 juin 2009.

Règlement et dossier d'inscription sur simple demande auprès de l'association : envoyez un mail à detti-scritti@orange.fr et notre secrétaire se fera un plaisir de vous envoyer tout ça.


Actualités

Mai 2008
Samedi 2 et dimanche 3 mai : Stage d'écriture "les lettres de l'être", animé par Bernadette de Schacht.

Du 28 mai au 5 juin, à la Bibliothèque Municipale de Bastia, rendu d'un atelier d'écriture en milieu scolaire, organisé par l'association U Vechju Liceu à l'école Gaudin et animé par Detti è Scritti, en présence de la romancière Stéphanie Benson. L'album illustré produit par les enfants est exposé à la bibliothèque sous forme de tableaux. Une lecture publique en présence de l'inspecteur d'académie, des élus et des élèves aura lieu le jeudi 4 juin à partir de 14h30.




Lutte contre les violences faites aux femmes - Fragments d'atelier

Fragment N°1
Avait-elle un aute choix ? (Jacqueline)

Elle est assise sur un banc à la droite du juge, un homme grisonnant, la cinquantaine, l’air sévère.
Son avocat, un jeune homme, au physique ordinaire, des petites lunettes rondes, un épi sur le haut du crâne, mal maîtrisé, brille sous l’effet du gel.
La voix u juge s’élève, posée, forte, la formule habituelle récitée comme une prière. Les mots scandés avec clarté sans doute pour rappeler que la justice, doit être impartiale et équitable, le juge intègre.
Le silence est total dans la salle. Elle raconte.

Je suis debout.
La pâte à Pizza, étalée sur la table.
A cheval sur une chaise, en face de moi, les bras croisés sur le dossier, dans notre minuscule cuisine, il éructe son chapelet d’injures, scène quotidienne qui m’use plus que le travail harassant de l’usine.
Son rire sardonique résonne à mes oreilles, comme une offense encore plus insupportable que les mots.
Mon cœur s’affole.
Mes tempes éclatent, comme un marteau piqueur qui me transperce.
Mes gestes sont de moins en moins précis, tant mes mains tremblent.
D’un geste vif, il attrape un couteau sur le plan de travail.
Je recule d’un pas.
Il avance son bras, passe la lame brillante du couteau sur le revers de ma main, il l’essuie lentement, il continue comme une caresse.
Me regarde, l’air menaçant.
Il rit encore plus fort, un rire qui se prolonge.
Il se penche en avant.
« Fille de pute », sera sa dernière phrase, avant de s’effondrer, dans un cri déchirant, les lèvres serrées, noircies par la douleur.
Le sang inonde son visage.
Je serre très fort dans ma main moite le rouleau à pâtisserie.
Je me laisse choir près de lui.
Incapable de réagir.
Combien de temps, je ne sais pas, je ne sais plus.
Des voix m’arrachent à cette torpeur.
Tout se bouscule dans ma tête, comme dans la cuisine.
Des hommes en blanc, des hommes en noir.
Et cette douleur cuisante, qui me tenaille.

Vous pouvez vous asseoir, Madame dit le juge dans un silence de plomb.
L’avocat, prend alors la parole. Il est jeune, avec des petites lunettes rondes, et un épi sur le haut du crâne, mal maîtrisé, qui brille sous l’effet du gel. Sa voix, d’abord hésitante, s’affermit au fur et à mesure de la conviction qui l’habite.

Face à un tel drame, nous devons nous interroger :
Sommes nous si éloignés du droit romain, établi au 12èmè siècle qui n’accordait de protection qu’au seul père de famille, patriarche au pouvoir illimité, qui considérait la femme comme un être inférieur ?
Allons nous continuer à ignorer ces drames quotidiens qui se passent souvent sur nos paliers, dans nos immeubles ? Allons nous continuer à fermer nos fenêtres pour ne pas entendre les vociférations de ces pères violents et ignorer les pleurs de ces enfants et de ces femmes, terrorisés ?
Allons nous longtemps encore faire semblant de ne pas remarquer ces ecchymoses cachées par des fards forcés, ces lèvres fendues sous des rouges carmin, ces larmes sous les allergies ?
Allons-nous encore longtemps fermer les yeux sur ces femmes humiliées, offensées, malmenées, victimes de la bassesse de certains hommes, qui n’ont plus rien d’humain ?
Oui, la violence n’est pas que masculine, oui il existe d’autres violences, mais les femmes et les enfants payent un lourd très lourd tribu à ces actes ignobles que nous ne devons, que nous ne pouvons plus ni ignorer, ni tolérer.
Si vous condamnez cette femme, vous la condamnez doublement. Son geste est répréhensible… mais avait-elle un autre choix ?

Fragment N°2 Le verdict (Olivier)

Attendu les faits qui vous sont reprochés, et après en avoir délibéré, le Tribunal vous condamne à une peine de cinq ans de prison dont 4 ans avec sursis.
La détention préventive ayant couvert la peine à effectuer, vous êtes libre.
Mais je voudrais quand-même vous rappeler que la violence engendre la violence.
Je voudrais aussi ajouter qu’un appel au secours, aussi inaudible soit-il, peut avoir une résonance et sauver des vies. Aujourd’hui, nombreux sont les coupables qui pourraient être à votre place. Témoins, voisins, familles, tous ceux qui n’ont pas su ou pas voulu entendre les échos du drame qui se déroulait, jour après jour, en toute impunité. Nul n’est plus sourd que celui qui ne veut pas entendre. Et je m’adresse là à toute l’assistance.

Fragment N°3 Germaine (Michèle)

Germaine travaille à l’emballage avec les hommes. Elle porte la même blouse grise, et fait le même travail pénible.
Peu importe comment elle s’habille là-dessous, et elle a peu à peu cessé d’y faire attention. Elle aimerait porter un pantalon, comme eux, ça éviterait qu’ils ricanent lorsqu’elle se penche, l’obligent à monter à l’échelle pour se régaler du spectacle, et l’appellent ‘ poil aux pattes’. Elle a bien essayé de se changer dans le réduit où on accroche les blouses, mais il lui fallait arriver avant les hommes, et ça l’obligeait à se lever trop tôt. Quant à s’habiller en pantalon devant Maurice, il ne faut pas y penser. Il ne veut pas en entendre parler :
-« J’ai pas marié une gouine, moi ! Une femelle en pantalon, et puis quoi encore ! Si jamais je te vois déguisée comme ça, je te jure….»
Elle a failli demander :
-« Et quoi, alors ? » au risque de prendre une baffe.
Depuis qu’il est en accident du travail, il passe ses journées devant la télé, et dépense une fortune en bière, et en cigarettes. En plus, il faut les lui apporter, au quatrième étage….
Au moins, quand on travaille, on n’a pas le temps de dépenser comme ça. Juste une cigarette à la sauvette, au fond du hangar : c’est interdit, mais ça aide à supporter la journée, et quelquefois le gros Georges, celui qui est passé contremaître, vient la rejoindre et lui offre un petit remontant. Il en profite pour lui mettre la main, mais elle a l’habitude, et ça ne lui fait plus ni chaud ni froid. Le remontant, par contre, ça fait du bien par où ça passe, et ça lui donne envie de rire.
Elle pense à Maurice, affalé sur le canapé défoncé, devant la télé qui grésille, et qu’on ne changera pas cette année, parce qu’avec ce qu’elle gagne….. S’il la voyait, lui qui est jaloux des hommes qui passent dans la rue !
Quand il travaillait, il était copain avec le gros Georges, qui est généreux avec les cigarettes, la bière et le rhum. Elle n’aime pas la bière : ça ne sent pas bon, et à force d’en boire, on devient gras et mou, comme ce bon à rien de Maurice. Maintenant qu’il est à la maison toute la journée, on croirait qu’il essaye de se rendre utile, rien que pour ne pas rester comme ça, sans bouger ? Tu parles…
Gueuler, oui, il sait. Râler après le tiers et le quart, les voisins et leurs gosses, le gouvernement, les politiques qui viennent dégoiser dans le poste , tous des pourris qui s’engraissent sur le dos du pauvre monde.
-« Et toi, alors, tu t’engraisses pas sur mon dos, peut-être ? »
Il lui a balancé sa canette de Kro à la tête, et il a fallu qu’elle essuie, mais c’était bien trouvé et elle était contente de lui avoir rivé son clou.
Il menace toujours de la plaquer et de s’en aller, mais pas de danger qu’il le fasse. Qui d’autre supporterait ? Les jeunes, tiens, elles ont bien raison de pas se marier. Pour ce que ça lui a rapporté, à elle….
Si elle avait pu continuer à l’école et prendre le certificat, elle aurait eu une place de vendeuse, elle n’avait qu’à demander. Mais Maurice avait râlé que les clients allaient lui faire du gringue…
Elle rit, réchauffée par le petit rhum. Du gringue, rien que ça. S’il savait…
Mais il ne saura pas. Elle rentrera comme tous les soirs en passant chez Félix Potin à la sortie du métro, où la patronne lui garde une ardoise. Ce soir, il y aura des saucisses et des frites et un kil de rouge pour Maurice. Elle le laissera devant la télé et ira se coucher tôt, vu que le soir, elle tient plus en l’air, comme on dit. Le bruit ne l’empêche pas de dormir.
Le bon côté des choses, c’est qu’il s’endort le plus souvent sur le canapé. Au moins, il ne l’embête plus la nuit ; c’est déjà ça.

Faut dire qu’avant, quand ils étaient jeunes, ils s’entendaient bien tous les deux. Il était beau gosse, dans le genre costaud, et elle était fière de se balader à son bras, et de danser avec lui. Bon danseur, aussi, et qui faisait soupirer les copines.
-« T’es bien tombée ! » qu’elles disaient, et Germaine était bien d’accord.
Un beau gars qui s’occupait bien d’elle, et ne courait pas le jupon. Jaloux, par contre : il fallait qu’il ait l’œil sur elle tout le temps, et il ne voulait plus qu’elle retourne chez ses vieux.
Non pas qu’elle y tenait vraiment, vu la vie qu’ils lui avaient menée, mais elle aurait bien aimé voir les petits. Maurice ne voulait pas en entendre parler, et refusait de l’accompagner :
-« Ce type, si je le vois, je le massacre ! » Et il l’aurait fait. Et, vu ce qui s’était passé, il aurait pas eu tort. Surtout qu’à cause de ça elle n’avait pas eu d’enfant. S’ils avaient eu un petit gars costaud qui lui ressemblait, la vie aurait été moins moche. Peut-être. Mais ça sert pas à grand-chose de gamberger, ça ne change rien, et il faut quand même monter les escalier, avec les bras chargés et les jambes qui vous rentrent dans le corps.

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